La commission de justice, de législation et des droits de l’homme au sein de laChambre des Représentants a tenu mardi 2 juin 2020, une réunion sous la présidence de M. Taoufik Mimouni, président de la commission, et en présence de M. Mohammed Benabdelkader, ministre de la justice, et ce, pour discuter différents aspects des mesures préventives entreprises pour assurer la continuité de l’administration judiciaire au moment où notre pays fait face à la propagation de la pandémie du Coronavirus.
Au début de son exposé, le ministre a déclaré que "Le ministère de la Justice, comme d'autres administrations publiques, a pris un ensemble de mesures, dont la décision de suspendre la tenue des audiences des différentes juridictions du Royaume à compter du 17 mars, dans le cadre de mesures préventives visant à limiter la propagation de la pandémie du Coronavirus (Covid-19), et dans un souci de sécurité de tous les fonctionnaires des juridictions du Royaume, magistrats et assistants judiciaires, ainsi que les justiciables et usagers, et ce, en concertation avec la présidence du ministère public et le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire.
Le ministre a ajouté que : « La mise en œuvre du dispositif de procès à distance par la technique de visioconférence a été imposé par les répercussions de la confrontation du Coronavirus », afin de protéger la sécurité des détenus et des agents des forces de l’ordre chargés de les transférer et de les garder, ainsi que la sécurité des magistrats, du personnel de l'administration pénitentiaire et du personnel judiciaire».
Le ministre a déclaré qu'après avoir recouru à la technique du procès à distance imposée par cette conjoncture exceptionnelle, le ministère a créé environ 190 comptes électroniques distribués aux juridictions et établissements pénitentiaires, en coordination avec les responsables judiciaires et les directions régionales de l'administration pénitentiaire, pour équiper les juridictions et des salles aménagées au niveau des établissements pénitentiaires d'ordinateurs mis en place pour cette opération, dotés des logiciels nécessaires qui ont été installés durant quatre jours.
Malgré l'absence de texte législatif permettant de recourir à cette technique, M. Benabdelkader a fait savoir que:"Les circonstances générales que traverse le Royaume à cause de cette épidémie, et le souci de toutes les structures de la justice de s'engager dans l'effort déployé par l'État pour circonscrire et limiter sa propagation, et afin d’assurer la sécurité sanitaire des magistrats, du personnel du secrétariat-greffe, des avocats, et des détenus, ont été tenues au sein de toutes les cours d’appel du Royaume des commissions tripartites composées des premiers présidents de ces cours, des procureurs généraux du Roi près ces cours, et des bâtonniers des barreaux. Il a été convenu d'adopter cette technique compte tenu de son efficacité et de son importance dans les circonstances actuelles ».
S’agissant du bilan de l’opération du procès à distance, le ministre a noté que 4 semaines après l’adoption de cette technique, l’opération a réalisé des résultats prometteurs reflétés par les chiffres et statistiques enregistrés. Ainsi, le nombre total d'audiences à distance tenues par les juridictions du Royaume a atteint 1469, au cours desquels 22268 affaires ont été traitées. Alors que le total des décisions judiciaires rendues au cours de ces séances s'élève à 9035.
La priorité et la plus haute importance ont été accordées à l'aspect de sécurité de l'information, et toutes les instructions émises par la Direction de sécurité des systèmes d'information relevant de l’administration de la défense nationale ont été respectées pour assurer la protection et la sécurité du système audiovisuel utilisé.
Le ministre a considéré que cette mesure historique permettra l’accès de la digitalisation et la communication à distance dans le travail judiciaire de ses plus grandes portes, soulignant la nécessité de s’appuyer sur les acquis de l’expérience de justice à distance pour s’engager dans un projet plus complet qui ne se limite pas uniquement à la révision des Codes de procédure civile et pénale, considérant que la législation constitue un moyen exécutif d'une vision partagée, et ainsi initier un travail sur une ligne directrice permettant la transition du modèle d'administration judiciaire et de la justice vers un modèle qui intègre les technologies de communication à distance et l'intelligence artificielle à différentes étapes du service judiciaire.
Le ministre a révélé que le bilan de la digitalisation dans l’action des juridictions du Royaume depuis le début de l’état d’urgence sanitaire- du 20 Mars au 1er juin 2020-, et au niveau de la gestion du travail à l’aune de la pandémie du Coronavirus. Ainsi, le ministre a présenté un bilan comprenant les statistiques logistiques intéressant la désinfection des espaces et bâtiments des juridictions.
En guise de réplique à l’exposé du ministre, les membres de la commission présents ont mis en avant certains points concernant la gestion de l’étape, comme les conditions de continuité du travail dans les tribunaux de première instance, dans les cours d’appel, la conciliation entre la distanciation sociale et les prestations des services judiciaires, l’adoption du système de délibération immatérielle à l’aune de la modernisation des services à distance, les conséquences juridiques et les dimensions constitutionnelles de la suspension des procès. Afin de surmonter les problèmes que les actions en justice ont connus, certain(e)s député(e)s ont appelé à l’amélioration de la technique de visioconférence, l’organisation rigoureuse des dossiers portés devant la justice de manière à assurer l’efficacité du service judiciaire à l’aune des mesures de distanciation sociale.
Les membres de la commission ont salué les efforts de l’Etat pour faire face à la propagation du Coronavirus, sous la conduite éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, qui a épargné au Maroc les répercussions économiques et sociales de la pandémie.
Les membres de la commission se sont également concentrés sur la nécessité de réhabiliter le chantier de la transformation digitale du système de la justice, de manière à comprendre toutes les mesures administratives de fluidité et d'efficacité, et à préserver les acquis et les droits garantis par la Constitution.
L’appel a également été lancé pour accélérer de nombreux chantiers législatifs, tels le projet d’organisation judiciaire, et les projets de loi tels le projet de loi N°10.16 modifiant et complétant le Code pénal.
Les membres ont également profité de l'occasion pour saluer la décision de grâce royale concernant un certain nombre de détenus des établissements pénitentiaires, et l’ont considéré comme un message adressé au système de la justice pour statuer sur les demandes de liberté provisoire, en plus de diminuer la détention préventive, chose qui réduirait la pression sur les établissements pénitentiaires.