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Communiqué sur la réunion de la commission des finances et du développement économique en présence du Wali de Bank Al-Maghrib

La commission des finances et du développement économique a tenu mardi 24 Novembre 2020 au siège de la Chambre, une réunion présidée par M. Abdellah Bouaounou, président de la commission, et en présence de M. Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib. Cette réunion a été consacrée à l’examen d’un nombre de points ayant principalement trait aux mesures exceptionnelles de la politique monétaire entreprise par la banque centrale depuis le début de la pandémie, au profit de l’économie en général, et le système bancaire en particulier. Cette réunion a également abordé l’impact de la crise sanitaire sur l’économie nationale. Il convient de rappeler que cette réunion s’inscrit dans le cadre de l’application des dispositions d’audition parlementaire conformément à l’article 45 de la loi formant statut de Bank Al-Maghrib, et faisant suite aux demandes de quelques groupes parlementaires dans le cadre de l’action de contrôle de la commission.

Au début de son exposé, le Wali de Bank Al-Maghrib a exprimé sa joie d’être présent de nouveau à l’institution législative afin d’examiner avec les représentant(e)s de la nation les répercussions de la crise actuelle et les mesures entreprises par Bank Al-Maghrib pour y faire face. Cela dit, le Gouverneur de la Banque centrale n'a pas manqué de rappeler les réunions précédentes qu'il avait eu avec les membres de la même commission depuis l'année 2015, se félicitant du nouveau cadre qui renforce les relations entre le Parlement et Bank Al-Maghrib eu égard au nouveau statut organisant les travaux de la Banque centrale.

Au terme de ce mot d'ouverture, le Wali de Bank Al-Maghrib a présenté un exposé détaillé aux membres de la commission, dans lequel il a d'abord tracé l'évolution de la crise sanitaire et économique au niveau international, qui a pris la forme de deux chocs, le premier a concerné la demande en raison des restrictions imposées à la circulation des personnes, et le second a affecté l'offre en raison de la forte perturbation des chaînes d'approvisionnement, avertissant à cet égard que le coût de cette pandémie, selon les prévisions du FMI, atteindra 11 mille milliards de dollars à la fin de 2021, soit l'équivalent de la production annuelle totale du Japon, de l'Allemagne et de la France, et 28 mille milliards de dollars d'ici 2025.

Par la suite, le Wali de Bank Al Maghrib a relevé les différentes mesures entreprises par Bank Al- Maghrib pour faire face à la crise économique. Ainsi, la banque a mis en place toutes les mesures, conventionnelles et non conventionnelles, dans tous les domaines relevant de sa compétence: politique monétaire et règles prudentielles, conduite de politique monétaire, protection des clients et fourniture de liquidités et inclusion financière, et gestion des réserves de change. Il a rappelé au début le programme « Intelaka », qui continue d'être mis en œuvre malgré les restrictions imposées à la mobilité économique en raison de la pandémie, même à un rythme plus lent que prévu. Jusqu’au 15 novembre 2020, le total des crédits accordés a atteint 1,9 milliard de dirhams, au profit de 9443 bénéficiaires.

Au niveau de la politique monétaire, le taux d’intérêt principal a été revu à la baisse de 25 points de base le 17 mars, puis de 50 points de base le 16 juin, pour se stabiliser à 1,5%. Ceci s'ajoute à la libéralisation complète du compte de réserve des banques qui a permis l'injection de liquidités permanentes supplémentaires à hauteur de 12 Milliards de dirhams. Anticipant une augmentation des besoins des banques en liquidités, Bank Al-Maghrib a assoupli ses conditions de financement au profit des banques conventionnelles, des banques participatives, ainsi que des associations de microcrédit. Ces mesures ont permis d'augmenter le volume des interventions de Bank Al-Maghrib sur le marché monétaire de 72 milliards de dirhams le 29 février à 105,7 milliards le 5 novembre 2020, en réponse à toutes les demandes de refinancement émanant des banques, ce qui a permis de maintenir des conditions favorables sur le marché monétaire. Bank Al-Maghrib a tenu à préserver la capacité d'offre de crédit des banques en assouplissant les règles prudentielles. La Banque centrale a également demandé aux banques de suspendre la distribution des dividendes au titre de l'année 2019, demande à laquelle ces dernières se sont conformées.

Le Wali de Bank Al-Maghrib a souligné que la banque centrale a exigé des banques de fournir toutes les informations aux clients relatives au report des échéances, et les coûts y afférents, sans négliger de les informer des raisons du rejet des demandes d'emprunt. Il est à noter que dans ce contexte, le taux de rejet des prêts est passé de 17% en 2016 à 10% en 2019, soit le niveau le plus bas enregistré ces cinq dernières années.

Le Gouverneur de la banque centrale a également souligné l'accélération relative de l'augmentation des crédits bancaires ces derniers mois, en particulier des facilités de caisse. En revanche, les prêts destinés aux ménages ont connu un fort ralentissement, dû aux restrictions imposées durant la période de confinement. Cependant, une légère amélioration a été observée depuis le mois d’août dernier. Il a également attiré l'attention sur les répercussions négatives de la crise sur les indicateurs du secteur bancaire, pour lesquels  l'encours de la dette a atteint 79 milliards de dirhams à fin septembre dernier. Ainsi, le taux de défaut de paiement a atteint 8,4% contre 7,6% à fin 2019. Par ailleurs, le suivi des échéances de prêts reportées pendant la crise met en garde contre la possibilité d'une augmentation du volume de l'encours de la dette au cours des prochains mois, la crise pouvant affecter négativement les indicateurs de stabilité financière.

D'autre part, le Wali de Bank Al-Maghrib a fait état de la forte demande en monnaie fiduciaire depuis le début de la crise, due au facteur de confinement et à l’opération de «solidarité», en plus des exigences du mois Ramadan et de l'Aïd al-Adha. Les retraits de billets de banque au niveau de Bank Al-Maghrib se sont élevés à 15,6 milliards de dirhams en mars, 12 milliards en avril, 10,6 milliards en mai, 6,4 milliards en juin et environ 21 milliards en juillet 2020. Dans ce contexte Il a souligné que le développement prévu du Registre social unifié sera un facteur positif pour le développement du système de paiement par téléphonie mobile et qu'il contribuera également à l’inclusion des activités informelles.

Le wali a salué les efforts déployés pour renforcer les réserves de change, dont le niveau a atteint le 23 octobre environ 294 milliards de dirhams, soit environ 7 mois d'importations de biens et services. Bank Al-Maghrib prévoit une récession de l'économie nationale d’un taux de 6,3% d'ici la fin de l'année en cours, suivie d'une croissance prévue à un taux de 4,7% en 2021. L'inflation devrait également rester faible et stable à moins de 1% en 2020 et 2021.

Au terme de son exposé, le Wali a souligné la nécessité de tirer les leçons de cette crise, de remédier aux faiblesses mises en évidence par la défaillance du système de santé, la vulnérabilité économique d'une large couche de la population, la taille importante du secteur informel, la fragilité du tissu productif et la prédominance des transactions monétaires.

Suite aux données présentées par le Wali dans son exposé, la discussion a été ouverte aux membres de la commission des finances et du développement économique, où la majorité des participant(e)s ont souligné l'importance de cette réunion et exprimé leur volonté de planifier ces réunions à une cadence régulière. Les questions ont principalement porté sur la relation des banques avec les clients, en particulier, pendant cette crise sanitaire, car les contraintes liées au financement de démarrage et la nécessité du suivi permanent des projets bénéficiant de ces prêts ont été suivies. Dans le même contexte, plusieurs représentants de la nation se sont interrogés sur le rythme de mise en œuvre du plan intégré d’accompagnement et de financement des entreprises (Intelaka).

Sur un autre volet, certain(e)s député(e)s ont discuté de l'importance d’élargir les pouvoirs de Bank Al-Maghrib, et de ne pas les restreindre à la stabilité des prix, et ce, en incluant de nouveaux objectifs tels l'augmentation des taux d'emploi. Ils se sont également interrogés sur la possibilité d'un financement direct de la trésorerie par Bank Al-Maghrib. Les questions des député(e)s ont porté, en outre, sur les niveaux des réserves de change, ainsi que sur le volume de liquidités en circulation et sur les besoins des banques pour leur financement. La réunion a également débattu du service de paiement par téléphone mobile et de son rôle dans la réalisation de l'inclusion financière, en particulier pour les femmes.

L'accent a été mis sur l’obligation de conscience pour tous, Gouvernement, Parlement, institutions, secteur privé et société civile, de ces transformations et des enjeux qui en découlent, et de l'action collective et concertée pour renforcer la confiance, soutenir la croissance économique et consolider la cohésion sociale de manière à réponde aux attentes légitimes des citoyennes et citoyens.