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Allocution de M. Rachid Talbi El Alami, Président de la Chambre des Représentants à l’occasion de la 144e Assemblée de l’Union Interparlementaire

Monsieur le Président,

Cher/es collègues,

Mesdames et messieurs,

 

C’est un honneur pour moi d'intervenir au nom du Parlement du Royaume du Maroc lors de cette Assemblée de l’Union Interparlementaire. Notre Union a été bien inspirée de choisir, pour cette Assemblée, le thème central : «Mobiliser les Parlements pour agir face aux changements climatiques», étant consciente des dangers qui guettent l'humanité et l'avenir de la Terre, ainsi que de la responsabilité qui incombe aux Parlements de contribuer à prévenir ces risques et d’inverser les tendances négatives en matière de dérèglements climatiques.

 

Au nom de la Section marocaine à l’Union Interparlementaire, je voudrais adresser mes remerciements et mes félicitations au Parlement et aux autorités du pays frère d'Indonésie pour les mesures prises afin d’assurer le succès de cette Assemblée.

 

Par ailleurs, il me plait de rappeler l'engagement du Royaume du Maroc, sous la conduite de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste, pour la préservation de l'environnement et pour la mise en œuvre des engagements pris par le Royaume dans le cadre de la Conférence des Parties à la convention des Nations Unies sur les changements climatiques.  Grâce à cet engagement, mon pays jouit de la confiance de la communauté internationale qui vient de l’élire, début mars à Nairobi, président de la sixième Assemblée des Nations Unies pour l'environnement (ANUE-6) pour un mandat de deux ans. Auparavant, et comme vous le savez, Marrakech avait accueilli, en novembre 2016, la 22e session de la Conférence des Parties de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 22), qui a adopté des mesures concrètes en faveur de la planète. Cette conférence fut, d’ailleurs, à l’origine de plusieurs initiatives pour faire prévaloir la justice climatique pour l'Afrique.

 

Le Royaume du Maroc a été parmi les premières nations à mettre en œuvre, de manière proactive, les mesures nécessaires pour la protection de l'environnement et la réduction du taux d’émissions causant le réchauffement de la planète. En effet, la protection de l’environnement fait partie intégrante des politiques générales de mon pays, conformément aux dispositions de la Constitution. Cette protection est assurée par la mise en œuvre des politiques publiques dans différents domaines, constituant ainsi un point de convergence entre ces politiques. Les contraintes de temps ne permettant pas de passer en revue toutes ces politiques dans ce domaine, il me semble néanmoins utile de rappeler brièvement certains points parmi les plus saillants :

 

  1. La politique ambitieuse du Royaume en matière de production d'énergie à partir de sources renouvelables (solaire, éolienne, marine et hydraulique) ;
  2. La politique agricole qui contribue à la préservation de l'environnement, à couvrir les besoins alimentaires des Marocains, ainsi qu’à l’approvisionnement de nombreux marchés internationaux ;
  3. La maîtrise des activités de pêche maritime grâce à un contrôle strict et la préservation de l’écosystème afférent au renouvellement des ressources halieutiques ;
  4. La mise en œuvre d’une politique ambitieuse en matière de mobilisation de l'eau douce et son usage rationnel dans les domaines agricole et industriel ;
  5.  L’interdiction de la fabrication du plastique non biodégradable nuisible à l'environnement et son remplacement par des industries écologiques et respectueuses de l’environnement ;
  6. L’obligation pour tous de tenir compte de la dimension environnementale dans tout projet d’investissement et la non-délivrance d’autorisation à tout projet dont le dossier ne contient pas une étude d'impact sur l'environnement prouvant le respect des normes écologiques ;
  7. L’accélération de la mise en place de centrales de production d’énergie de sources renouvelables, notamment solaire; le complexe solaire « Noor », à Ouarzazate,  considéré parmi les plus grandes et rares centrales de production d'énergie propre au monde; la généralisation de ce modèle dans diverses régions du Royaume, y compris dans  les villes des provinces du Sud, Noor Laâyoune et Nour Boujdour et Dakhla, qui verra la mise en place d'un vaste projet de production d'énergie éolienne pour un coût d'environ de trois milliards de dollars, et qui fera appel aux toutes dernières technologies en la matière. Il convient de souligner que 28 villes marocaines - de Tanger à Lagouira - disposent aujourd'hui de projets de production d'énergie à partir de sources renouvelables. Grâce à ces projets, ainsi qu’à d'autres déjà programmés, et avec la libéralisation du secteur de production de l'énergie et l'ouverture du domaine d'autoproduction, mon pays est aujourd'hui un pionnier à l’échelle mondiale en matière de production d'énergie propre ;
  8. La réutilisation des eaux usées après traitement et le dessalement des eaux de mer, ce qui conforte la politique ambitieuse du Maroc en matière de gestion des ressources hydriques.

 

Conformément à son crédo en matière de politique étrangère, fondée sur la solidarité, le Royaume s’emploie à partager son expérience et sa politique avec les pays africains frères, et ce, à travers des projets phares. Ainsi, l'Initiative AAA, lancée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI lors de la Conférence des Parties à la convention des Nations Unies sur les changements climatiques, tenue à Marrakech en 2016, a pour objectif stratégique de relever le défi de réduire la vulnérabilité de l'Afrique et de son agriculture face aux dérèglements climatiques et la mise en œuvre de projets agricoles dans un certain nombre de pays du continent, contribuant ainsi à résorber la pauvreté.

 

Par rapport à la souffrance de l'Afrique causée par le dérèglement climatique – elle qui n’émet que 4% de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre - nous réitérons notre appel pour la mise en place de partenariats productifs afin de faire face aux risques que les perturbations climatiques font courir aux citoyennes et aux citoyens africains. Ces partenariats devraient sortir du cadre traditionnel étroit de l’aide ou de la coopération pour le développement, vu que le continent dispose d'un énorme potentiel de production des richesses, tant humain que naturel (60% des terres arables de la planète sont en Afrique).

 

Monsieur le Président,

Cher/es collègues,

 

La pollution du milieu marin constitue un autre danger imminent qui doit être affronté par le biais de plans urgents à l’échelle planétaire, compte tenu du fait que les mers contribuent à hauteur de 50 % à la satisfaction des besoins alimentaires de la population mondiale et fournissent 50 % de l'oxygène nécessaire à la vie sur Terre.

 

Avec une façade atlantique s’étalant sur près de 3.000 km et une autre sur la mer Méditerranée de plus de 500 km, mon pays s'est engagé, depuis des années, dans l'exploitation durable, rationnelle et réglementée des ressources maritimes. Ainsi, 95 % des opérations de pêche sont soumises à un contrôle strict et à une inspection rigoureuse, en plus du respect total des périodes de repos biologique et des quantités autorisées de pêche.

 

Conformément à sa vision et à sa politique en matière de préservation de l’écosystème marin, le Royaume du Maroc fait siennes toutes les initiatives internationales visant à concrétiser cet objectif. Ainsi, le Chef du Gouvernement du Royaume du Maroc a récemment pris part à One Ocean Summit, tenu en février 2022 à Brest, en France, auquel ont participé les chefs d'État et de Gouvernement des pays de l'Union européenne et de 13 pays non membres de l'UE. Mon pays est déterminé à poursuivre son implication en vue de soutenir l'élaboration et la ratification de conventions internationales qui protègent les océans, au niveau des eaux internationales, contre la pollution, en particulier le fléau des matières plastiques, des déchets des produits pétroliers et de la surpêche, et définir des zones marines protégées.

 

Monsieur le Président,

 

En tant que législateurs, nous nous posons la question de savoir ce qui entrave la mise en œuvre des conventions conclues relatives à la protection de l'environnement. En effet, il existe de nombreuses réponses à cette question, mais il n’en demeure pas moins que l’élément fondamental qui empêche l’application de ces conventions réside dans le faible engagement des Gouvernements et des bailleurs de fonds par rapport à ce qui est convenu. S’ajoutent à cela la faiblesse des fonds promis pour financer des politiques et des mesures alternatives à celles causant les émissions de gaz à effet de serre, le manque d’engagement effectif des pays donateurs pour une économie verte et durable, ainsi que le partage insuffisant des technologies propres, sans oublier leur coût excessif.

 

Le non-respect des engagements envers le Fonds vert - censé être alimenté à hauteur de 100 milliards de dollars par an - n'est qu'un signe parmi d’autres de la faiblesse de ces engagements.

 

Il ne fait aucun doute que la pandémie de Covid-19 a été une épreuve à l’échelle mondiale qui a mis le concept de solidarité internationale sous les feux de la rampe. Si la période pandémique a été riche en enseignements, il nous appartient de les garder à l’esprit en vue de l’utilisation des technologies de l'information et de la communication et des connaissances dans l’économie et les services durables. Pour cela, il incombe d'abandonner l'égoïsme, de faire preuve d'un esprit de solidarité effective et de partager les compétences et les connaissances.

 

Si les Parlements sont appelés à poursuivre leur mission de contrôle et de législation en vue d’atteindre ces objectifs, ils sont appelés à faire prévaloir la pédagogie de l'exemple en matière de préservation de l'environnement, à travers l’adoption de nouvelles technologies dans le partage des données et dans la production de l'énergie qu'ils utilisent - aussi  réduite qu’elle puisse être - à partir de sources renouvelables. C’est précisément ce que la Chambre des Représentants du Royaume du Maroc a commencé à faire depuis quelques mois, couvrant ainsi plus de 50% de ses besoins énergétiques (en moyenne annuelle) à partir de sources renouvelables. En outre, en privilégiant l'échange numérique des données, elle a réduit sa consommation de papier de 80%.

 

S’il est vrai qu’en termes de risques environnementaux, nous sommes tous dans le même bateau, il n’en est pas moins vrai que les pays du Sud souffrent plus que d'autres de l’impact des dérèglements climatiques. En effet, ils demeurent plus vulnérables à cet égard, comme en témoignent les phénomènes de sécheresse, de désertification, de détérioration de l’écosystème forestier et végétal, d’exode et de migration dus aux facteurs climatiques. Les femmes, les enfants, les personnes à besoins spécifiques et les petits agriculteurs sont, d’ailleurs, les plus affectés par les perturbations climatiques.

 

Ces situations interpellent la volonté politique de la communauté internationale et mettent à l'épreuve les valeurs que nous sommes censés partager. Elles interpellent, par-dessus tout, notre sens de responsabilité à nous tous.

 

Je vous remercie pour votre aimable attention.